Lors d’une conférence de presse tenue ce mercredi 6 novembre 2024 à son siège social, Petit Lambert Ovono, président de la Société Gabonaise de l’Évaluation des Politiques Publiques (SOGEVAL), a exprimé son soutien à la nouvelle Constitution soumise au référendum ce 16 novembre. Son argumentaire, divisé en trois parties, a mis en lumière les objectifs et le fond du projet de constitution, tout en soulignant l’importance de la participation de la société civile.
Petit Lambert Ovono a tenu à préciser dès son propos introductif que la SOGEVAL n’est ni un parti politique ni un mouvement politique, mais un cabinet de consulting spécialisé dans l’évaluation des projets, programmes et politiques publiques. « Nous connaissons à fond les projets, les programmes et les politiques publiques. Parce que pour faire les évaluations, pour faire le suivi, le suivi et l’évaluation se basent sur les politiques publiques, les programmes et les projets, » a-t-il déclaré. Leur travail consiste à évaluer ces projets pour des commanditaires, principalement l’État, des organisations internationales et parfois des entreprises. Les évaluations sont généralement confidentielles, mais la SOGEVAL peut s’auto-saisir pour mener des évaluations, bien que cela soit coûteux.
Un choix encouragé par les Objectifs de transition
Ovono a rappelé le contexte politique avant le 30 août 2023, marqué par l’incertitude et la peur des Gabonais après les élections. « Avant le 30 août 2023, très peu de Gabonais avaient le sourire. Tout le monde s’interrogeait, que va devenir demain? On a voté, je ne sais plus, je crois, le 26. On était déjà au 29, pas de résultat pour un pays où l’information circule maintenant à 100 à l’heure, » a-t-il déclaré. Le 30 août, les forces de défense et de sécurité ont pris le pouvoir, mettant fin au régime d’Ali Bongo et de Billy Bi Nze. Les objectifs des forces de défense et de sécurité étaient clairs : libérer le Gabon du PDG et du pouvoir d’Ali Bongo, rendre le pouvoir aux civils, restaurer les institutions via une nouvelle constitution, et redonner la dignité au peuple gabonais. « On était libérés de quoi? On était libérés du PDG et du pouvoir d’Ali Bongo et de Billy Bi Nze, puisqu’on était prisonniers, » a-t-il souligné. Ovono a insisté sur le fait que les trois derniers objectifs dépendent du vote de la nouvelle constitution. Sans cette constitution, il est impossible de rendre le pouvoir aux civils, de restaurer les institutions et de redonner la dignité aux Gabonais.
Analyse du Fond du Projet de Constitution
Ovono a expliqué que la SOGEVAL a évalué la pertinence et l’efficacité des objectifs des forces de défense et de sécurité. « Le mot pertinence signifie que le projet qu’on nous propose va réellement répondre aux attentes des populations, » a-t-il précisé. La pertinence signifie que le projet répond aux attentes des populations, et l’efficacité implique que les objectifs sont atteints au fur et à mesure de la mise en œuvre du projet. Il a également souligné l’importance de la participation de la société civile, des ONG, des églises et des syndicats dans le processus législatif. « Lorsque le gouvernement propose un projet de loi au Parlement, ce projet de loi qu’un ministre apporte pour exposer les motifs pour lesquels on veut faire le projet de loi, ce projet de loi doit être accompagné de l’avis du Conseil d’État, » a-t-il expliqué. Il a donné l’exemple de la réforme du Code pénal, où les magistrats ont proposé des amendements, mais où la société civile n’a pas suffisamment participé.
Recommandation de Voter « Oui »
Petit Lambert Ovono a réaffirmé que le vote de la nouvelle constitution est crucial pour atteindre les objectifs des forces de défense et de sécurité. « Sans cette constitution, on ne peut pas rendre le pouvoir aux civils. On va leur rendre le pouvoir avec quoi? Puisqu’il y a déjà un régime transitoire, » a-t-il souligné. Il a appelé à une participation active de la société civile dans le processus législatif pour garantir que les besoins et les attentes des populations sont pris en compte.
Au regard de son examen du projet de constitution, soumis au référendum du 16 novembre 2024, la SOGEVAL a réalisé un rapport recommandant de voter Oui. Cette recommandation repose sur plusieurs raisons clés, résumées dans une affiche intitulée « 10 raisons pour voter oui ».
Les militaires ont promis une transition de deux ans, et le respect de ce chronogramme nécessite l’adoption de la nouvelle constitution. Comme le souligne M. Petit Lambert, « ils ont donné leurs paroles, ils ont décliné les objectifs. Ils doivent tenir à leurs paroles. » Si le « non » l’emporte, les militaires continueront à gouverner sans délai fixé, ce qui pourrait prolonger leur mandat indéfiniment.
La nouvelle constitution vise à restaurer les institutions décriées, comme la Cour constitutionnelle et l’organisation des élections. Le processus de rédaction a inclus 38 000 contributions et 801 amendements, reflétant une large consultation. M. Petit Lambert explique que « le gouvernement transitoire a fait appel pendant trois mois aux contributions. À tout le monde sans exception. »
L’article 6 de la nouvelle constitution introduit une démocratie pluraliste et inclusive, permettant à tous les citoyens, y compris la société civile, les églises, et les syndicats, de participer. M. Petit Lambert se réjouit de cette inclusion, affirmant que « l’article 6 dit qu’on est dans une démocratie pluraliste, inclusive, tout le monde, même les simples citoyens. »
La constitution affirme la pleine souveraineté des Gabonais sur leurs ressources naturelles (pétrole, forêts, gaz, mines, mer). La négociation avec les puissances étrangères est nécessaire pour la restauration de ces ressources. M. Petit Lambert souligne que « la restauration aux gabonais de leurs ressources naturelles doit se faire avec la négociation ».
L’article 27 garantit un accès égal aux postes électifs pour les jeunes, les personnes handicapées, les femmes et les hommes. M. Petit Lambert insiste sur l’importance de cette égalité, affirmant que « ce n’est plus 20%, 30% de jeunes. Non, ce n’est plus ça. C’est l’égalité parfaite qui doit désormais être appliquée. »
La constitution inscrit pour la première fois la décentralisation, permettant aux collectivités locales de gérer leurs affaires avec des moyens votés par le budget. M. Petit Lambert souligne que « la Constitution écrite directement que les collectivités locales aident l’État dans la gestion de leurs collectivités, de leurs citoyens, mais avec des moyens votés par le budget directement. »
La société civile est désormais une composante de la démocratie pluraliste et participative. Le projet de constitution réserve une place importante à Dieu, contrairement à la constitution de 1991 qui pratiquait la sécularisation. M. Petit Lambert critique cette sécularisation, affirmant que « les politiciens de 1991 ont décidé de chasser Dieu du Gabon. Vous avez les conséquences, jusqu’en 2023, les conséquences d’avoir voulu chasser Dieu. »
Le vote « oui » permettrait de rétablir l’ordre constitutionnel, de rendre le pouvoir aux civils, et de ramener les militaires dans les casernes. M. Petit Lambert souligne que « le vote Oui, parce que nous souhaitons que les militaires tiennent leur pouvoir. »
La nouvelle constitution vise à restaurer les institutions et à redonner dignité aux Gabonais. M. Petit Lambert conclut en appelant à voter « oui » pour atteindre les objectifs fixés par les forces de défense et de sécurité, notamment le retour à l’ordre constitutionnel, la restauration des institutions, et la dignité des Gabonais.
Un argumentaire structuré soulevant plusieurs interrogations
L’argumentaire de Petit Lambert Ovono en faveur de la nouvelle constitution est structuré et bien articulé, mais il soulève plusieurs questions et points de critique.
Ovono insiste sur la pertinence et l’efficacité des objectifs des forces de défense et de sécurité. Cependant, il est crucial de se demander si ces objectifs sont réellement atteignables dans le contexte actuel. La pertinence d’un projet ne garantit pas nécessairement son succès, surtout dans un environnement politique instable.
Bien que la SOGEVAL souligne l’importance de la participation de la société civile, il est essentiel de noter que cette participation doit être réelle et non symbolique. La société civile doit avoir un véritable pouvoir de décision et d’influence, et non simplement être consultée pour la forme.
La promesse d’une transition de deux ans par les militaires est un point clé de l’argumentaire. Cependant, l’histoire montre que les transitions militaires peuvent souvent dépasser les délais initialement prévus. Il est donc crucial de mettre en place des mécanismes de contrôle et de transparence pour garantir que les engagements sont respectés.
L’affirmation de la souveraineté des Gabonais sur leurs ressources naturelles est louable, mais elle nécessite des négociations complexes avec les puissances étrangères. Il est important de se demander si le gouvernement transitoire a les capacités et les ressources nécessaires pour mener à bien ces négociations.
L’introduction d’une démocratie pluraliste et inclusive est un pas en avant, mais elle doit être accompagnée de réformes institutionnelles profondes pour garantir que tous les citoyens, y compris les minorités, ont une voix égale. La simple inclusion dans la constitution ne suffit pas; des mécanismes de mise en œuvre doivent être mis en place.
La décentralisation est une idée prometteuse, mais elle nécessite des ressources financières et humaines importantes. Les collectivités locales doivent être dotées des moyens nécessaires pour gérer efficacement leurs affaires, ce qui peut être un défi dans un contexte de ressources limitées.
La place réservée à la société civile et aux églises dans la nouvelle constitution est un point positif, mais il est important de garantir que cette place est réelle et non symbolique. Les églises et la société civile doivent avoir un véritable pouvoir d’influence et de décision.
Le soutien de la SOGEVAL à la nouvelle constitution est justifié par le respect des engagements des militaires, la restauration des institutions, l’inclusion de tous les citoyens dans la démocratie, et la souveraineté sur les ressources naturelles. Cependant, il est crucial de rester vigilant et de mettre en place des mécanismes de contrôle pour garantir que ces objectifs sont réellement atteints. Le vote « oui » est vu comme un moyen de rétablir l’ordre constitutionnel et de rendre le pouvoir aux civils, mais il doit être accompagné de réformes institutionnelles profondes et d’une participation réelle de la société civile.