Actes de tortures : le changement dans la continuité ?

Rappelons une définition tirée de Wikipedia. Dictature : « La dictature désigne un régime politique dans lequel une personne ou un groupe de personnes exercent tous les pouvoirs de façon absolue, sans qu’aucune loi ou institution ne les limite ».

Autrement dit, dans une dictature ou un régime totalitaire, les gens au pouvoir font ce qu’ils veulent, sans que qui que ce soit n’aie le droit de dire quoi que ce soit. Ils peuvent emprisonner, torturer, priver les médias de subvention, monter des dossiers contre les citoyens qui représentent une menace contre eux, racketter les entreprises etc. La manipulation du Code Pénal fournira les arguments pour accuser les récalcitrants de « outrage à agents publics, déstabilisation, atteinte à la sécurité publique, mutinerie, tentative de coup d’État, organisation de rassemblement interdit, destructions de biens, trouble de l’ordre public, atteinte à la sureté de l’État, diffusion de fausses nouvelles ». Et l’État de Droit qui avait été enfourché le 30 août 2023 comme cheval de bataille se retrouve finalement bien tordu.

Le « coup de Libération » dont est issu ce régime de transition a été perpétré au nom de la lutte pour la démocratie et contre la dictature, et a fait du changement son leitmotiv. C’est pour cela que malgré mes principes affichés et assumés de réfractaire à la violence, il y a quand même une situation qui me donne envie d’envoyer un sokuto geri dans les parties génitales de mon interlocuteur. Quand celui-ci me sort de façon stupide un argument du style : « oui, certainement il y a des abus. Mais ou étiez-vous pour dénoncer les mêmes abus du temps d’Ali Bongo ? Si vous n’avez rien dit à l’époque, vous devez aussi vous taire maintenant ». Le seul avantage d’entendre de telles insanités, c’est qu’au moins on peut avoir une illustration de ce que signifie triple crétin. Qui dans ce cas ne relève pas de l’insulte, mais du diagnostic médical. Car comment admettre benoîtement que les porte-flambeau du changement ne fassent que du vulgaire copier-coller des bêtises des régimes précédents ? Un régime qui fait un coup d’État en prétendant changer les choses sera jugé à l’aune des différences positives, et surtout négatives, avec son prédecesseur.

Ce n’est pas en changeant de numéro de République ou en faisant voter une nouvelle Constitution qu’on apporte le
changement. Car ce sont plus ou moins les mêmes qui trainent dans le cercle du pouvoir, quels que soient les
dirigeants : les magistrats, les forces dites de l’ordre, les politiciens, les milieux d’affaires mafieux, et les journalistes au plus offrant. Et quand je vois comment ce pays a des enquêteurs et des juges aussi
rapides et zélés pour s’occuper des inoffensifs et non armés compatriotes, je m’étonne encore qu’il puisse y avoir des bandits et des criminels dans ce pays.

Dire que tout va bien actuellement, et refuser d’admettre qu’il y a de graves problèmes qui augurent de problèmes
encore plus graves, est donc une façon de pratiquer la politique de l’autruche. Ainsi, celui qui veut vivre sereinement
dans ce pays et ne pas laisser une image exécrable et vouée aux gémonies, a intérêt à faire de la réconciliation nationale une priorité.

Il est certain que ce n’est pas avec la pratique actuelle des choses que la crise va se régler de façon durable, car cela ne fera qu’accroitre la haine, la division, et favoriser un jour la montée en puisssance d’un martyr inattendu.

Pierre Parfait Mbadikumbe
Journaliste/Rédacteur/Consultant communication