Lors de la récente cérémonie de présentation des vœux de la presse au Chef de l’État, l’étonnement était à son comble face à une scène inattendue : les premières loges, habituellement réservées aux journalistes, étaient occupées par des influenceurs et tiktokeurs. Une situation qui soulève de nombreuses interrogations sur la définition même des métiers de la presse et sur le respect des valeurs de ce corps de métier.
Traditionnellement, cet événement est un moment privilégié pour les professionnels des médias reconnus, où journalistes, rédacteurs en chef, et correspondants viennent échanger et porter les préoccupations du secteur au plus haut sommet de l’État. Cette année, cependant, plusieurs professionnels aguerris ont été laissés sur le carreau, au profit d’individus qui, bien que populaires sur les réseaux sociaux, ne peuvent être considérés comme des membres du corps journalistique au sens strict.
La question légitime qui se pose est donc la suivante : qui a décidé de la composition de l’assistance ? Était-ce une initiative du protocole d’État ou un choix du service de communication ? L’opacité autour de cette décision suscite un mécontentement général dans les rangs des journalistes.
La présence des influenceurs, souvent associés à des contenus de divertissement ou à des campagnes de marketing, interpelle. Bien qu’ils bénéficient d’une large audience et d’un impact certain, leur rôle n’est pas celui d’informer de manière objective ou de contribuer aux débats citoyens, missions essentielles de la presse.
Assimiler ces figures à des journalistes pourrait non seulement diluer la crédibilité des professionnels du secteur, mais aussi brouiller la perception du public sur la nature et la mission de la presse.
Si rien n’est fait pour corriger cette « anomalie », il est à craindre que la situation ne dégénère davantage. L’an prochain, verrons-nous des comédiens ou d’autres figures du showbiz occuper les places réservées aux journalistes ? Ce glissement risquerait de discréditer la fonction même de ces cérémonies et, par ricochet, de banaliser l’importance du journalisme dans une démocratie.
Il appartient aux organisateurs de cet événement de rectifier le tir dès à présent. La sélection des participants doit être revue, afin de garantir que seuls les représentants des médias professionnels, ayant pignon sur rue et reconnus pour leur travail, soient invités. Une consultation avec les associations de journalistes et les organes de presse serait un premier pas vers une réorganisation plus respectueuse de l’essence de cette cérémonie.
L’enjeu dépasse le simple cadre de l’événement : il s’agit de préserver l’honneur et la dignité d’une profession qui constitue un pilier de la démocratie. Une chose est sûre, les journalistes ne doivent pas être relégués au second plan dans leur propre maison.
