Médias africains unis contre les violences faites aux femmes : un appel à l’action transformatrice

Le Forum annuel des médias, organisé par le Réseau des médias africains pour la promotion de la santé et de l’environnement (REMAPSEN), s’est achevé ce vendredi 6 décembre à Dakar sur une note d’espoir et d’engagement renouvelé. Pendant trois jours, 70 journalistes d’Afrique de l’Ouest, du Centre et de Madagascar ont échangé, débattu et planché sur des stratégies pour éliminer les violences faites aux femmes et aux filles, un fléau qui continue de hanter le continent.

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Une urgence africaine

 

Sous le thème « La lutte contre les violences faites aux femmes et aux filles en Afrique, respect des droits humains et autonomisation », ce forum s’inscrit dans la campagne des 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre. Youssouf Bamba, président du REMAPSEN, a ouvert les débats en rappelant le rôle crucial des médias dans cette lutte. « Les médias ne sont pas seulement des témoins, mais des acteurs clés du changement », a-t-il affirmé.

Mme Arlette Mvondo, directrice pays d’ONU Femmes Sénégal, a quant à elle dressé un tableau alarmant : « En Afrique de l’Ouest et du Centre, une femme sur trois subit des violences basées sur le genre. Les mutilations génitales, les mariages précoces, les violences sexuelles et domestiques continuent de priver des millions de femmes et de filles de leurs droits fondamentaux. Aucun pays n’a réussi à éliminer ce fléau. »

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Des progrès fragiles, des défis immenses

 

Dieneyba Ndao, chargée de projet Genre et santé sexuelle à ONU Femmes, a souligné les avancées législatives dans certains pays, comme l’adoption de lois contre les mariages précoces ou l’accès à l’avortement médicalisé. Cependant, elle a également pointé du doigt les reculs, comme en Gambie, où la loi contre les mutilations génitales féminines a failli être remise en cause. « Nous avons une population très jeune, ce qui est à la fois une richesse et un défi », a-t-elle rappelé.

Dr Angela Muruli, coordonnatrice régionale des programmes à ONU Femmes, a insisté sur l’importance des cadres juridiques internationaux et régionaux. « Ces cadres permettent de tenir les gouvernements responsables de leurs engagements envers les droits des femmes et des filles », a-t-elle expliqué.

 

Les médias, acteurs du changement

 

Les panels ont mis en lumière le rôle central des médias dans cette lutte. Edouard Gning, journaliste à Brut Afrique, a souligné le pouvoir du numérique et de la jeunesse pour provoquer des changements. « Combien de grandes révolutions ont été menées par le numérique et la jeunesse ? Nous, journalistes, avons le devoir d’informer et d’interpeller les politiques sur leurs engagements », a-t-il déclaré.

Cécile Goudou, journaliste à l’ORTB (Bénin), a proposé trois axes pour renforcer l’impact des médias : la spécialisation sur les droits des femmes, l’exploitation des périodes de sensibilité politique (comme les élections), et le journalisme collaboratif transnational. « Ces questions sont transnationales. Travailler ensemble, c’est amplifier notre impact », a-t-elle affirmé.

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Des voix traditionnelles et modernes s’unissent

 

Moussa Dione, chef traditionnel, a rappelé que la tradition n’a jamais toléré la violence envers les femmes. « La tradition n’a jamais accepté de violence envers les femmes et les jeunes filles. Jamais. C’est pourquoi je m’engage personnellement à lutter contre ce fléau », a-t-il déclaré.

Altesse Ahan Kalidji Béatrice, Reine d’Oussoye et ambassadrice d’ONU Femmes, a partagé son expérience de terrain. « J’ai des ambassadrices et des enquêteurs dans chaque village. Si un cas de violence est signalé, j’interviens immédiatement », a-t-elle expliqué.

 

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Vers une charte médiatique engagée

 

Les participants ont adopté une charte de conduite pour améliorer le traitement médiatique des violences faites aux femmes et aux filles. Cette charte vise à transformer les normes sociales et à promouvoir les droits humains. « Les médias doivent amplifier la voix des sans-voix et devenir des acteurs du changement », ont-ils insisté.

Le forum a lancé un appel clair aux médias africains : continuer à jouer un rôle central dans cette lutte, pour un avenir où les femmes et les filles pourront vivre libres de toute violence et pleinement autonomes.

Ce forum a été un moment fort de réflexion et d’engagement. Les médias africains, armés de leurs plumes, micros et caméras, sont prêts à relever le défi. Car, comme l’a rappelé Edouard Gning, « le changement ne vient pas toujours des politiques. Il vient de la population. Et nous, journalistes, en sommes les porte-voix. »

 

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