La tempête politique s’intensifie à l’approche de la présidentielle

La scène politique gabonaise est en ébullition. Ce samedi 1er mars 2025, lors d’une conférence de presse à Libreville, trois figures emblématiques de l’opposition gabonaise ont lancé un cri d’alarme. Ali Akbar Onanga Y’Obegue, ancien ministre et porte-parole du groupe, a exigé le report de l’élection présidentielle prévue le 12 avril prochain. Aux côtés de Pierre Claver Maganga Moussavou, ancien vice-président, et d’Alain-Claude Bilie-By Nzé, ancien Premier ministre, ils dénoncent des « irrégularités majeures » qui, selon eux, menacent la crédibilité du scrutin.

 

« Le fichier électoral est invalide, car il ne respecte pas les normes du nouveau Code », a martelé Onanga Y’Obegue, la voix chargée d’une colère contenue. Ces mots, prononcés devant une salle comble de journalistes et d’observateurs politiques, résonnent comme un coup de tonnerre dans un ciel déjà chargé d’incertitudes. Le groupe accuse en effet le gouvernement de transition d’avoir manipulé le fichier électoral et modifié la loi électorale pour favoriser un candidat en particulier – une allusion à peine voilée à Brice Clotaire Oligui Nguéma, président de la transition, dont les intentions restent encore floues.

 

Un processus électoral sous tension

 

Le cœur du débat réside dans le fichier électoral, révisé à deux reprises depuis janvier. Selon les opposants, ces révisions ne respectent pas le nouveau Code électoral promulgué le 19 janvier 2025. « Si les élections se tiennent dans ces conditions, elles ne seront ni transparentes ni crédibles », ont-ils affirmé, soulignant que les modifications apportées au Code électoral ont été faites « à des fins personnelles », altérant ainsi les principes fondamentaux de la démocratie.

 

Ces accusations ne sont pas anodines. Elles touchent à l’essence même de ce que devrait être un processus démocratique : la transparence, l’équité, et la confiance des citoyens. Pour ces opposants, il est impératif de reporter le scrutin afin de permettre une révision complète du processus électoral. « Loin d’être un simple détail technique, ces irrégularités pourraient affecter la légitimité du futur président », ont-ils insisté, appelant à une réforme véritablement démocratique.

 

 La Cour constitutionnelle, dernier rempart ?

 

Dans leur quête de justice, les contestataires entendent saisir la Cour constitutionnelle de la transition. Ils espèrent ainsi obtenir une remise à plat du processus électoral, en accord avec les principes de transparence et d’équité. Mais dans un contexte où l’Autorité de contrôle des élections et du référendum (ACER) est perçue comme partiale et manipulée, la route s’annonce semée d’embûches.

 

« Cette instance est partiale et manipulée pour avantager le candidat potentiel du Comité pour la transition et la restauration des institutions (CTRI) », a dénoncé Onanga Y’Obegue, pointant du doigt une institution censée garantir l’intégrité du scrutin. Ces mots, lourds de sens, révèlent une méfiance profonde envers les institutions en place, et soulèvent des questions cruciales sur l’avenir démocratique du Gabon.

 

Les candidats dans l’ombre

 

Alors que la date limite pour déposer les candidatures approche – fixée au 8 mars –, aucun des trois opposants n’a encore officiellement déclaré sa candidature. Pourtant, les signaux sont là. Pierre Claver Maganga Moussavou, bien qu’atteint par la limite d’âge (plus de 70 ans), a laissé entendre qu’il déposerait son dossier. Alain-Claude Bilie-By Nzé, quant à lui, parcourt le pays dans ce qui ressemble à une pré-campagne électorale. Seul Albert Ondo Ossa reste silencieux, continuant de revendiquer la victoire à la présidentielle d’août 2023, interrompue par le coup d’État qui a renversé Ali Bongo Ondimba.

 

Ce silence, loin d’être anodin, traduit une tension palpable. Chacun semble attendre le moment propice pour faire son entrée dans l’arène électorale, tout en gardant un œil vigilant sur les manœuvres de l’adversaire. La campagne officielle, prévue du 29 mars au 11 avril, promet d’être intense, voire explosive.

 

Un pays à la croisée des chemins

 

Le Gabon se trouve aujourd’hui à un carrefour crucial de son histoire. Les enjeux de cette élection dépassent largement la simple alternance politique. Il s’agit de redéfinir les fondements mêmes de la démocratie gabonaise, de restaurer la confiance des citoyens, et de garantir un avenir où la transparence et l’équité ne seront plus de vains mots.

 

Les propos d’Ali Akbar Onanga Y’Obegue résonnent comme un appel à la vigilance : « Si nous laissons ces irrégularités passer, nous trahissons les principes pour lesquels nous nous battons depuis des années. » Ces mots, chargés d’émotion et de détermination, rappellent que la démocratie n’est jamais acquise. Elle se conquiert, se défend, et parfois, se reconquiert.

 

Alors que le compte à rebours est lancé, le Gabon retient son souffle. Les prochains jours seront décisifs, et chaque décision, chaque parole, chaque geste, pourrait influencer le destin d’une nation entière. Dans cette tempête politique, une question demeure : le Gabon choisira-t-il la voie de la démocratie, ou celle des compromis douteux ? La réponse, comme souvent, se trouve entre les mains de ceux qui osent se lever pour défendre leurs convictions.

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