La circulaire du ministère de l’emploi du Cameroun: une invite à la xénophobie

Alors qu’on parle d’intégration sous-régionale en Afrique centrale, le Cameroun qui a longtemps déclaré souhaiter l’ouverture des frontières, a montré qu’il est en réalité un état très protectionniste. Dans sa circulaire parue le 15 janvier 2024, le ministère chargé de l’emploi à exprimer la volonté de refuser aux étrangers le droit au travail et à la création d’entreprise sur le territoire camerounais.

Cette circulaire, basée sur le code du travail camerounais, réduit drastiquement aux étrangers la liberté d’exercer leurs activités professionnelles sur son territoire. En effet, ce code du travail, en son article 27 alinéa 2 et 3, stipule que l’exercice d’une activité professionnelle par un étranger requiert une autorisation du ministre de l’Emploi et de la formation professionnelle.

Pour exercer une activité, chaque étranger devrait obtenir un visa de travail délivré par le ministre chargé de l’emploi, son employeur. Cette autorisation ne pouvant avoir lieu que si le travailleur n’exerce qu’en tant qu’employé. Puisque l’État conditionne l’obtention du visa de travail par la demande d’un employeur éventuellement de nationalité camerounaise.

L’État camerounais a même mise en place des sanctions pénales à tout étranger en situation irrégulière, c’est-à-dire ne passant pas par cette procédure pour exercer sa profession.

Ce qui implique qu’un expatrié ne pouvant être en général employeur, ne peut créer sa propre entreprise, sauf cas exceptionnel.

Cette circulaire indique deux choses graves. D’une part, en intervenant dans les procédures de recrutement dans le secteur privé, l’État camerounais bafoue la liberté des employeurs camerounais de recruter les profils qu’ils souhaitent employer et par conséquent, d’exercer librement leurs fonctions. C’est maintenant au Ministère de l’emploi de décider du recrutement de travailleur étranger dans le secteur privé. Autrement dit, l’État camerounais est au moyen du visage de travail, l’employeur des étrangers dans le secteur privé.

D’autre part, une telle décision est un message clair lancé par les autorités camerounaises : les expatriés n’ont ni le droit d’investir ni de travailler sur le territoire camerounais, sauf avec autorisation du ministère de l’Emploi. Ainsi, les expatriés ne sont pas invités à vivre au Cameroun, puisque sans activité professionnelle, ils ne peuvent y vivre ou résider longtemps. C’est donc une façon subtile de pratiquer la xénophobie.

On comprend mieux l’histoire de notre compatriote gabonaise, vendeuse de sardines, qui avait été emprisonnée dans les geôles camerounaises. Les ressortissants gabonais, comme ceux d’autres pays étrangers ne sont pas désirés au Cameroun.

Un tel message devrait d’ailleurs susciter une attention particulière des autorités des pays ayant leurs citoyens au Cameroun, notamment celles du Gabon.

Au regard de ce qui précède, peut-être serait-il de bon aloi d’imiter cette décision en appliquant uniquement aux ressortissants camerounais. Les autorités gabonaises devraient revoir les dispositions bienveillantes à l’égard des entrepreneurs camerounais, qui d’ailleurs pour la plupart exerce dans le secteur informel.

Ainsi sauf cas exceptionnel, les enseignants, tenanciers de bars, de librairies, lieux de restauration et de discothèques camerounais devront se voir interdits d’exercer en territoire gabonais. Les propriétaires d’entreprise nationalité camerounaise devront aussi voir leurs établissements fermés.

Franck Charly Mandoukou

Directeur de la publication, Journaliste libre et indépendant. Gabon infos,Toute l'information du Gabon. Les dernières actus, la politique, l'économie, la société, la culture, la justice, les faits divers...