AFFAIRE WEBCOR ITP : LE CTRI S’EST-IL TIRÉ UNE BALLE DANS LE PIED ?

Depuis quelques jours, les Gabonais, patriotes, qui font de la souveraineté et de l’honneur de leur pays, leur cheval de bataille, ne s’interrogent plus sur les raisons qui ont conduit l’un d’entre eux, Hervé Patrick Opiangah, en sa qualité de citoyen, déposer plainte contre X pour concussion, fraude fiscale et infractions diverses à la gouvernance économique sur l’affaire opposant l’État gabonais à l’entreprise maltaise Webcor ITP au sujet du projet de construction du grand marché de Libreville.

Rappelons les faits et l’histoire, avant de nous projeter sur les conséquences et de nous interroger sur les motivations des auteurs. En 2010, l’État gabonais signe une convention avec la société maltaise Webcor ITP pour la construction du grand marché de Libreville. 5 ans plus tard, il décide de la suspension dudit projet, cela se passe sous le régime d’Ali Bongo Ondimba, renversé le 30 août 2023 par les Forces de Défense et de Sécurité du Comîté pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). Ce qui révolte la société maltaise qui opte pour ester en justice auprès du tribunal international de Paris qui condamne l’État gabonais à lui payer 66 milliards de francs CFA au titre de faux et usage de faux et corruption. Les Maltais déboutés, que leur restait-il à faire si ce n’est de s’exécuter ?

C’était sans compter avec ce qui ressemblerait à de la roublardise. En effet, le CTRI arrivant, prenant les rênes du pouvoir, qui semble donner l’impression de n’avoir pas saisi l’enjeu historique de son « coup d’état », aurait choisi de ramer à contre-courant, en décidant de commettre deux institutions étatiques, l’Agence judiciaire de l’État et le Conseil d’État, auprès du Tribunal arbitral de Paris, fait curieux, pour cette fois, signer un protocole transactionnel, un arrangement entre les parties qui aura pour conséquence de condamner le Gabon à payer les 66 milliards de francs à Webcor ITP. Où sont l’Honneur et la Fidélité tant brandis et promis depuis le 30 août aux gabonais par le CTRI qui forcément n’afficherait pas, innocent dans cette affaire, on ne peut plus compromettante ? N’est-on pas là ni plus, ni moins, que devant un cas de crime de haute trahison et d’atteinte à la souveraineté de l’État ?

Que vient faire le Procureur de la République dans cette affaire ?

La question ne saurait être anodine dès lors que les textes sont clairs pour qu’il n’y ait pas de place pour l’amalgame. L’on peut aisément relever que l’implication de Jean Paul Komanda, premier président du Conseil d’État, magistrat de haut rang, de surcroît assermenté, renvoie la responsabilité au ministre de la Justice de diligenter une enquête en saisissant l’inspecteur général des Services judiciaires et non le parquet. Et d’ailleurs, l’Article 532 du Code de procédure pénale ne nous édifie-t-il pas lorsqu’il dispose : « Tout fait de nature à entraîner des poursuites répressives à l’encontre d’un magistrat relève de la compétence de la Cour de cassation, sauf en cas de crime flagrant ou de délit flagrant. A ce titre, les poursuites font l’objet d’une enquête spéciale confiée sur instructions du ministre chargé de la Justice à l’Inspection générale des services judiciaires. Les rapports et procès verbaux établis en application des dispositions ci-dessus tiennent lieu d’enquête préliminaire préalable à l’exercice de l’action publique » ?

L’Article 533 du même Code dispose, lui, : « En dehors des cas de crime flagrant ou de délit flagrant, l’arrestation, la garde-à-vue ou la détention préventive d’un magistrat ne peut intervenir que sur autorisation du président de la République en sa qualité de garant de l’indépendance du pouvoir judiciaire après avis du Conseil supérieur de la Magistrature ».

Enfin, l’Article 534 dispose : « Les rapports et procès verbaux issus de l’enquête spéciale sont transmis au ministre chargé de la Justice, lequel saisit, s’il y a lieu, le procureur général près la Cour de cassation aux fins d’ouverture d’une information ».

Voici qui devrait, au-delà de renseigner, interpeller les plus hautes autorités de la République en tête desquelles le Président de la Transition, le général Brice Clotaire Oligui Nguema, qui, reprenant un passage de l’Hymne national, « La Concorde », a promis qu’il est désormais là, le temps de « l’essor vers la félicité ». La question est bien celle du comment y parvenir sans se faire violence et répéter les actes que l’on disait bannis ?

Ondamba Chartrin Césard

Redacteur en Chef