La cour du lycée Ntchorere a servi de cadre, ce mercredi 1er avril, à un meeting politique aussi vibrant qu’inédit. Stéphane Germain Iloko Boussiengui, candidat à la présidentielle du 12 avril, a délivré un discours empreint d’émotion, de symboles traditionnels et de promesses concrètes devant une foule dense, venue écouter celui qui se présente comme le « candidat du cœur ». Entre diagnostic politique et appel à l’unité, l’événement a révélé les contours d’une campagne axée sur la rupture et l’ancrage culturel.

Un meeting sous le signe de la tradition et de la jeunesse
Vêtu d’un pagne traditionnel et pieds nus, Iloko Boussiengui a ouvert son discours par une métaphore filée : celle du médecin appelé à « soigner les maux du Gabon ». Un choix vestimentaire et rhétorique assumé, soulignant sa volonté de « renouer avec les racines » tout en proposant une gouvernance pragmatique. « Regardez comment je suis habillé. C’est comme ça que le Gabonais s’habillait au village. Nous devons valoriser nos cultures », a-t-il lancé, sous les applaudissements.
La jeunesse, au cœur de sa stratégie, a été représentée par Chrysostome Mondjo, dont le discours percutant a fustigé l’immobilisme du régime sortant : « Quelle institution a été restaurée depuis le coup d’État ? », a-t-il interrogé, appelant à voter pour « le seul capable de poser un bon diagnostic ». Arielle Andeme, porte-voix des femmes, a enfoncé le clair : « Iloko n’est pas le président d’une caste. Le Gabon appartient à tous. »

Un projet de société : Santé, éducation et autonomie alimentaire
Loins des slogans creux, le candidat a détaillé ses priorités avec une précision chirurgicale :
– L’école publique, pour contrer le développement de ce qu’il qualifie de « mafia » face aux dérives du privé, qu’il promet de réhabiliter.
– La santé, sujet douloureux pour lui après la mort de sa fille, victime des « urgences défaillantes ».
– Les infrastructures, avec un projet de métro reliant Libreville à Owendo, pour désengorger une capitale étouffante.
– L’autosuffisance alimentaire, en réduisant les importations massives (2000 milliards FCFA par an).

« Je ne veux pas m’éterniser au pouvoir. Sept ans suffisent pour changer les choses », a-t-il martelé, en opposition implicite aux dérives autoritaires souvent dénoncées en Afrique.
La tradition comme socle, mais pas comme division
Si Iloko revendique son attachement aux rites bwiti et aux langues bantoues, il rejette toute instrumentalisation ethnique : « La tradition n’est pas le tribalisme. Ceux qui le disent sont superficiels. » Un équilibre délicat, dans un pays où les clivages régionaux ont souvent été exploités.
Un ton humble, mais une ambition ferme

Contrairement à ses adversaires, Iloko a évité les attaques personnelles, préférant insister sur le « respect » et la « collaboration ». Son projet de société, qu’il promet de publier en ligne, se veut participatif : « Un président ne sait pas tout. Il doit s’appuyer sur les intelligences du pays. »
Le pari de l’authenticité
À l’heure où les Gabonais semblent lasser des promesses non tenues et des leaders déconnectés, Iloko Boussiengui mise sur un mélange rare : l’authenticité culturelle couplée à un programme technique. Reste à savoir si cet électrochoc séduira au-delà de Ntchorere. Une certitude : le « docteur » a réussi son premier examen clinique – celui de la crédibilité.
Jimmy Mandoukou, journaliste, maître en anthropologie
