LES RÉPERCUSSIONS DE LA GUERRE COMMERCIALE SINO-AMERICAINE SUR LES ÉCONOMIES AFRICAINES: UNE ANALYSE PROSPECTIVE 

Par Dr Esther Rodrigue Olanga Chercheur associé au Centre International de Recherche en Économie et Gestion pour le Développement (CIREGED), Université Omar Bongo

Chercheur associé à la Chaire Africa Positive Impact (API), Académie des Sciences du Management de Paris (ASMP)

*Résumé*

La montée des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, matérialisée récemment par une augmentation substantielle des droits de douane américains à hauteur de 145 %, suscite des inquiétudes au sein de la communauté internationale. Cette étude propose une lecture analytique des implications possibles de cette guerre commerciale sur les économies africaines, en tenant compte de leur intégration croissante dans les chaînes de valeur mondiales et de leur dépendance aux exportations de matières premières.

*Introduction*

L’annonce, début avril 2025, d’un plan tarifaire agressif par l’administration Trump marque un tournant majeur dans la politique commerciale américaine. En ciblant spécifiquement la Chine, mais également d’autres partenaires commerciaux, cette stratégie protectionniste a engendré une riposte immédiate de Pékin, entraînant un gel de contrats commerciaux majeurs avec les États-Unis, notamment dans le secteur aéronautique.

Ce contexte de surenchère tarifaire pose de nombreuses interrogations quant à ses effets indirects sur les pays tiers, notamment les nations africaines, dont les économies demeurent sensibles aux fluctuations de la demande mondiale et à l’évolution des équilibres commerciaux internationaux.

*La dynamique actuelle du conflit commercial*

En réaction aux surtaxes américaines, la Chine a suspendu la réception de 179 appareils Boeing commandés par ses compagnies aériennes, tout en arrêtant l’achat de pièces détachées auprès de fournisseurs américains. Parallèlement, les marchés financiers ont enregistré une baisse notable, en raison de l’incertitude générée par l’escalade commerciale. Le gouvernement américain, par la voix de sa porte-parole, affirme ne pas avoir besoin d’un accord, renforçant ainsi l’idée d’un conflit prolongé.

*Vulnérabilités structurelles des économies africaines*

L’Afrique, bien que non directement impliquée dans cette guerre commerciale, est exposée à ses conséquences par le biais de plusieurs canaux :

Canal des matières premières : Les pays exportateurs (Nigéria, Algérie, Angola, Côte d’Ivoire, Ghana, etc.) risquent de subir une contraction de la demande mondiale, accompagnée d’une baisse des prix sur les marchés internationaux.

Canal financier : Une intensification de la volatilité sur les marchés financiers mondiaux pourrait engendrer des sorties de capitaux des économies émergentes, affectant le financement des projets publics et privés.

Canal monétaire : La pression sur les devises locales, face à un renforcement du dollar, pourrait compromettre la stabilité macroéconomique de plusieurs pays.

Canal industriel : Les chaînes d’approvisionnement intégrant des composants américains ou chinois pourraient être perturbées, notamment dans des secteurs comme l’agroalimentaire, l’électronique ou l’automobile.

*Positionnement politique et recommandations*

L’Union africaine, par la voix de ses instances officielles, a exprimé son inquiétude face à cette détérioration de l’environnement commercial international. Elle plaide en faveur du maintien du dialogue multilatéral et de la consolidation des accords de coopération. Face à ces menaces, les États africains doivent accélérer la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), favoriser la diversification économique et renforcer les capacités locales de transformation.

*Conclusion*

La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine constitue un risque exogène majeur pour les économies africaines. Si les impacts varient selon le degré d’ouverture et de diversification des pays concernés, l’ensemble du continent reste vulnérable aux effets de contagion liés à la mondialisation des échanges. À terme, seule une stratégie concertée de résilience économique et d’intégration régionale permettra de limiter les dommages collatéraux et de positionner l’Afrique comme un acteur à part entière dans l’architecture commerciale mondiale.

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